Des jardins de la nuit s'envolent les étoiles
Abeilles d'or qu'attire un invisible miel,
Et l'aube, au loin, tendant la candeur de ses toiles,
Trame de fils d'argent le manteau bleu du ciel.
Du jardin de mon coeur qu'un rêve lent enivre,
S'envolent mes désirs sur les pas du matin,
Comme un essaim léger qu'à l'horizon de cuivre,
Appelle un chant plaintif, éternel et lointain.
Ils volent à tes pieds, astres chassés des nues,
Exilés du ciel d'or où fleurit ta beauté,
Et, cherchant jusqu'à toi des routes inconnues,
Mêlent au jour naissant leur mourante clarté.
Armand Silvestre - "Aurore"
Je veux que le matin l'ignore
Le nom que j'ai dit à la nuit,
Et qu'au vent de l'aube, sans bruit,
Comme une larme il s'évapore.
Je veux que le jour le proclame,
L'amour qu'au matin j'ai caché,
Et sur mon cur ouvert penché,
Comme un grain d'encens, il l'enflamme.
Je veux que le couchant l'oublie
Le secret que j'ai dit au jour,
Et l'emporte avec mon amour,
Aux plis de sa robe pâlie !
Armand Silvestre - "Le secret" |
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Etoile dont la beauté luit,
Comme un diamant dans la nuit,
Regarde vers ma bien-aimée
Dont la paupière s'est fermée.
Et fais descendre sur ses yeux
La bénédiction des cieux.
Elle s'endort... Par la fenêtre
En sa chambre heureuse pénètre ;
Sur sa blancheur comme un baiser,
Viens jusqu'à l'aube te poser,
Et que sa pensée, alors, rêve
D'un astre d'amour qui se lève !
Jean Lahor - "Sérénade florentine"
Vaisseaux nous vous aurons aimés en pure perte ;
Le dernier de vous tous est parti sur la mer.
Le couchant emporta tant de voiles ouvertes
Que ce port et mon cur sont à jamais déserts.
La mer vous a rendu à votre destinée
Au-delà du rivage où s'arrêtent nos pas.
Nous ne pouvions garder vos âmes enchaînées ;
Il vous faut des lointains que je ne connais pas.
Je suis de ceux dont les désirs sont sur la terre.
Le souffle qui vous grise emplit mon cur d'effroi,
Mais votre appel, au fond des soirs, me désespère,
Car j'ai de grands départs inassouvis en moi.
Jean de La Ville de Mirmont -
"Vaisseaux nous vous aurons aimés..." |