L’interview spéciale Halloween de
Jean-François Borras…
La dernière fois que vous êtes venu aux Chorégies d’Orange, pour un opéra, c’était en 2012 dans Turandot. Vous revenez cet été avec un rôle de premier plan, celui de Faust dans Mefistofele de Boito, qui s’avère également être une prise de rôle, vos impressions ?
Je me rappelle très bien de ce Turandot avec toujours cette émotion énorme de pouvoir chanter dans ce lieu. Pour cette prise de rôle, je ressens de l’impatience et peut être jusqu’à ce que l’on soit en scène, un peu d’appréhension mais à mon avis c’est en rapport au lieu.
C’est une scène exigeante, qui a accueilli énormément de grands chanteurs. Il faut donc être à sa hauteur et à la hauteur des attentes de son public.
Avant votre prestation aux Chorégies cet été, vous chanterez deux fois le Faust de Gounod, qu’attendez-vous de celui de Boito ?
Les deux sont différents, déjà par la langue, Faust est en français et Mefistofele est en italien. Puis, la version de Boito est plus proche du Faust de Goethe. Boito va plus en profondeur que Gounod, son œuvre est plus intéressante en ce qu’elle approfondit plus les rapports entre le diable et Faust. Celle de Gounod est plus édulcorée. Le personnage de Faust est moins désespéré dans la version de Boito et le diable ne lui propose pas simplement la jeunesse, mais de connaître réellement l’extase.
Le livret de Mefistofele, qui d’ailleurs a été écrit par Boito lui même, est plus recherché et plus en phase avec le Faust de Goethe.
Vous êtes un enfant du pays monégasque, Jean-Louis Grinda mettra en scène Mefistofele cet été, avez vous déjà travaillé ensemble ?
Je connais effectivement Jean-Louis Grinda depuis un certain nombre d’années…j’ai fait toutes mes études et j’ai habité plus de 35 ans à Monaco.
Nous avons travaillé pour la première fois ensemble dans sa Manon (de Massenet) à Rome en 2010, puis sur une Traviata à Monte-Carlo, reprise à Antibes en 2013, un Rigoletto toujours à Antibes en 2014 et enfin en mai dernier sur sa nouvelle production de Werther à Valencia. Ça se passe toujours très bien. Jean-Louis Grinda sait ce qu’il veut. Il est organisé et on travaille toujours très sereinement avec lui.
Connaissez-vous sa vision de l’œuvre ?
Nous en avons parlé un tout petit peu. Je sais que c’est une œuvre qu’il a déjà montée. Jean-Louis m’a parlé d’Erwin Schrott, qui interprètera aussi à Orange le rôle-titre, en me le décrivant comme le « Mick Jagger de l’opéra ».
Vous êtes rentré à 8 ans à l’Académie de musique Rainier III de Monaco, son chœur d’enfant vous accompagnera cet été dans Mefistofele.
Quel souvenir gardez-vous de cette formation ?
Ce n’est pas exactement cela. Je suis rentré aux petits chanteurs de Monaco à 8 ans, puis à 18 ans pour ma formation lyrique à l’Académie de musique Rainier III. Je ne savais pas que le chœur d’enfants participerait au spectacle et cela me fait d’autant plus plaisir que le chef de chant du chœur de cette Académie, Bruno Habert, est un ami. Nous sommes entrés ensemble à 8 ans comme petits chanteurs puis nous avons fait nos études à l’Académie pour devenir chanteurs lyriques. Bruno s’est ensuite tourné vers la direction chorale. Cela me fait très plaisir de partager un opéra avec lui cet été.
J’ai de très bons souvenirs de cette période avec mon professeur de chant Marie-Anne Losco. Nous avons eu des masterclasses avec Gabriel Bacquier ou encore Michèle Command…c’est une chance de travailler auprès d’artistes de si haut niveau ! Cela nous aide à nous préparer à ce métier, qui peut parfois se révéler très différent de ce que l’on apprend au Conservatoire. C’est une bonne préparation au monde professionnel.
Nous sommes en pleine période d’Halloween, quels types de rapports votre personnage, Faust, entretient-il avec le diable, Mefistofele ?
Dans le Faust de Gounod, il y a de la peur, mais dans le Mefistofele de Boito, c’est plus de l’intrigue. Faust y est moins effrayé que curieux, il prend ça plus légèrement, passant de Marguerite à Hélène de Troie, comme un jeu.
Une musique, un compositeur à écouter à Halloween ?
Robert le Diable de Meyerbeer est bien adapté à Halloween, surtout le ballet des nonnes damnées. Je garde un très bon souvenir de cette œuvre que j’ai chanté à Covent Garden. La musique est vraiment belle et Boito s’est d’ailleurs inspiré du compositeur.
« …quel est ton film d’horreur préféré ? » ¹
J’en ai deux : Shining de Stanley Kubrick que j’ai vu lorsque j’étais plus jeune et dont l’ambiance pesante m’a marqué et plus récemment Conjuring, les dossiers Warren, inspiré de l’histoire vraie d’un couple d’exorcistes.
¹ Référence au film Scream de Wes Craven (1996)